SNUipp-FSU Guyane
http://973.snuipp.fr/spip.php?article1321
Le SNUipp FSU Guyane reçu au ministère à propos des rythmes
Constats et demande de dérogation
mercredi, 21 mai 2014
/ SNUipp-FSU 973 /

co-secrétaire départemental du SNUipp Guyane

La réforme des rythmes scolaires, mise en place dans 5 communes de Guyane à la rentrée 2013, n’est pas applicable en l’état dans notre académie.

De nombreux collègues, parents et agents municipaux nous ont interpellé, tout au long de l’année, afin de nous faire part de leur mécontentement et des difficultés rencontrées lors de l’application de cette réforme.

La pétition lancée par le SNUipp-FSU Guyane auprès des enseignants des 5 communes concernées a recueilli plus de 500 signatures. Nous avons interpellé le recteur ainsi que le comité de suivi des rythmes sur les conséquences désastreuses qu’engendre la réforme des rythmes. L’administration, les municipalités ont fait le choix de rester sourd aux différentes critiques préférant donner l’illusion "que tout va pour pour le mieux !"

Le SNUipp-FSU Guyane a fait le choix d’en référer au ministre de l’éducation nationale en lui présentant la réalité de la Guyane et en demandant que notre académie puisse bénéficier d’une dérogation.

Vous trouverez, ci-dessous, la présentation faite au ministère lors de l’audience du 15 Mai 2014.

Monsieur le Ministre,

L’académie de la Guyane est riche de sa jeunesse (50% de la population a moins de 25 ans), de sa diversité culturelle et linguistique (35 langues) et de sa biodiversité.

Pourtant, les défis à relever sont immenses :

- des milliers d’élèves ne sont pas scolarisés
- les constructions scolaires sont à l’arrêt
- le chômage concerne 31% des moins de 30 ans et atteint 50% des jeunes sans diplômes
- 30% des jeunes guyanais sont touchés par l’illettrisme, 70% de ces jeunes sont sans diplôme. Ces informations (source INSEE) montrent bien que notre académie est en pleine mutation et souffre de nombreuses carences.

L’école de Guyane n’est pas à la hauteur des besoins de la jeunesse et accuse de nombreux retards :

- manque de locaux adaptés (installations sportives, salles de repos, salles RASED, salles des maîtres, BCD, salles informatique, conditions climatiques....)
- manque de matériel scolaire
- manque de recrutement et de formation des personnels
- nombre d’enfants utilisant le transport scolaire trop important (plus de 50%, dès la maternelle),
- saturation du réseau de transports, qui impose des rotations (certains enfants prennent le bus ou la pirogue dès 5h45) manque voire absence (dans certaines communes) de service de restauration scolaire

La réforme des rythmes scolaires, mise en place à la rentrée 2013 par cinq communes de Guyane, n’a fait qu’accroître les difficultés et les inégalités de notre système éducatif. Cette réforme n’est pas adaptée au contexte guyanais :

- absence d’adaptabilité de ces transports (les enfants qui partent en bus n’ont aucun accès possible au périscolaire)
- augmentation perceptible de la fatigue et de l’absentéisme des élèves
- répartition des activités très difficile avec ce découpage hebdomadaire.
- faiblesse du tissu associatif adapté à la prise en charge des élèves de 3 à 10 ans
- sous-équipement des associations comme des écoles
- non gratuité des activités entraînant l’inaccessibilité de nombreux enfants
- nombre trop important d’enfants issus de milieux défavorisés, visés par cette réforme, qui n’ont pas accès au périscolaire.
- déception des familles quant aux activités proposées (peu variées, sans matériel, avec du personnel non formé)
- aggravation des conditions de travail : salles de classe et matériel scolaire utilisés, dégradation des locaux...
- impossibilité de préserver des espaces de vie privée avec la programmation fréquente de réunions réglementaires après la classe, le mercredi après-midi ou le samedi.
- absence de PEDT permettant le respect du cadre légal et la définition d’un réel projet éducatif

Vous constatez, Monsieur le Ministre, que les difficultés de notre académie sont nombreuses. Aujourd’hui, l’école peine à former et faire réussir la jeunesse de Guyane.

Compte tenu du climat, des conditions de travail, de scolarisation et du manque d’infrastructures en Guyane, le SNUipp-FSU demande une organisation dérogatoire dans notre département tant que la situation n’est pas normalisée.

Cette dérogation devrait permettre de :
- regrouper les enseignements sur un nombre raisonnable de demi-journées (pas plus de 6) afin de limiter les temps de transports des élèves.
- prévoir un temps de collation après 2 heures de classe dans toutes les écoles.
- prévoir la restauration scolaire tous les jours
- regrouper les heures de périscolaire sur un ou deux après-midi pour faciliter la récupération des élèves par les familles.

Veuillez croire, Monsieur le ministre, en notre attachement au service public d’éducation.

Pour le secrétariat du SNUipp-FSU Guyane,

Fabienne ROCHAT, Alexandre DECHAVANNE.

Monsieur Bernard Lejeune, directeur adjoint du cabinet du ministre de l’Education nationale, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, nous a écoutés aborder les difficultés liées à la mise en place de la réforme, sur les spécificités et les inégalités rencontrées dans les communes des trois départements.

Pour la Guyane, nous avons exposé nos conditions de travail et spécificités climatiques, la situation de la scolarisation avec le nombre important d’élèves transportés, le manque d’infrastructures, la quasi-inexistence de la restauration scolaire et la pénurie de moyens alloués au périscolaire à ce jour dans les différents communes.

Monsieur Lejeune ayant déjà effectué un déplacement sur la Guyane, a été sensible à nos propos. Le climat, les transports scolaires, l’absence de PEDT, le manque d’infrastructures, sont autant de frein à de tels changements. Il rappelle que le ministère s’est engagé à financer la restauration scolaire en outre-mer, mais entend les difficultés liées à l’état des locaux et à la pénurie de services et d’installations capable de réaliser cette restauration.

Le directeur de cabinet du ministre précise que le code de l’éducation prévoit des possibilités de dérogations, en particulier pour les outre-mer. Il reconnait à la situation de la Guyane des similitudes avec celle de Mayotte.

Sébastien Sihr, secrétaire général du SNUipp-FSU, demande au directeur de cabinet que le ministre impulse rapidement cette décision, parce que les recteurs ne se mouilleront pas.

Bernard Lejeune s’est engagé à nous répondre d’ici le 6 juin sur une organisation dérogatoire dans notre département tant que la situation ne sera pas normalisée. Il attend des précisions quant aux difficultés rencontrées dans chaque commune.